Me revoici pour te conter la suite de mon petit périple en Colombie. Si tu as loupé la première partie, tu peux la retrouver ici: - La Colombie et l'histoire d'un OUI Savais-tu qu’il existait un désert unique au monde en plein coeur de la Colombie? On l’appelle la Tatacoa, mais c’est techniquement un ‘bosque seco tropical’. Bon, je sais, c’est un peu bizarre de dire 'forêt sèche', car y’a pas d’arbres, c’est aussi sec et chaud qu’une mamie niçoise et les cactus enracinés dans le sable crient qu'on est dans le désert. Niveau marketing, le terme désert est bien plus vendeur dans un pays recouvert de jungle. C’est le concept inverse d’un oasis. Bref, le long détour en vallait vraiment la peine, d’autant plus que j’arrive pile poil pour la parade planétaire et que la Tatacoa est reconnu mondialement pour ses observatoires astronomiques. Je passe une journée à errer dans les formations naturelles et les couleurs exceptionnelles jusqu’à ce qu’un arc-en-ciel décide de voler la vedette aux planètes. Le ciel se couvre d’épais nuages et à défaut d’avoir vu une ligne de points lumineux dans le firmament, je quitte le désert avec de formidables images de mon passage.
Chemin faisant, je découvre un sanctuaire à orchidées avec en bonus, une jolie cabane nichée dans les entrailles de ce projet. Je m’offre le bonheur d’y trainer une nuitée pour papillonner dans un environnement propice à mon enchantement. Je me perds volontairement à butiner à travers les sentiers quand je tombe nez à nez avec une mamie frippée, aussi pied-nus que moi, mais armée d’une machette aussi grande que mon bras. Au premier abord, son regard est affuté comme sa lame et ses yeux perçants ne semblent pas acceuillants. Un colibri profite de la situation pour vérifier si mon oreille ne serait pas une source de nectar. C’était le ‘sésame ouvre-toi’ dont elle avait besoin pour ouvrir les vannes de son coeur. Quand la Nature envoie un signe, on l’écoute. Sur le chemin du retour, on papote plantes, champignons et le fruit de ma passion. Elle m’offre un premier café, suivi d’un plat réchauffé et insiste pour que je rencontre son grand frère, à qui je lui fais beaucoup penser. Elle s’excuse d’être un peu ‘bête’ et de ne pas pouvoir approfondir notre conversation, mais promet que son ainé aura pleins d’explications. J’attends donc sagement l’arrivée du patron et dès son arrivée, nous abordons la création, l’intention et la mission de ce petit bout de paradis. Ma petite mamie a vu juste - c’est un coup de coeur fraternel et on passe la soirée à décortiquer les possibilités de ce projet. Je tombe parfaitement à pic avec mes idées atypiques et je lui établi un plan d’action pour faire évoluer la vision. J’ai donc le plaisir de vous annoncer qu’ils ouvrent à présent leurs portes à des bénévoles internationaux et que notre but sera de diffuser l’amour des plantes et de l’humanité dans tout le quartier (pour commencer).
Je suis aussi venu en Colombie pour faire connaissance avec un arbre unique au monde - le palma de cera ou palmier de cire. C’est le plus grand palmier du monde (60m), et officiellement l’arbre national depuis 1985. Tout le monde sait que c’est dans la vallée de Cocora que les plus beaux spécimens existent, et c’est précisément parce que tout le monde le sait, que j’ai refusé d’y aller. C’est couillon de ma part et j’en suis totalement conscient, mais j’ai souvent tendance à éviter les lieux trop organisés. Je reste (plus ou moins) fidèle à mon âme d’explorateur et je favorise les villages reculés, les contrées moins exotiques et les bourgades où le tourisme de masse ne trouve pas son bonheur. Pourtant, je suis le premier à avouer que la fréquentation touristique rend les lieux encore plus beaux. Les autorités et les entrepreneurs déploient une énergie colossale pour offrir aux voyageurs un régal sans égal. Les couleurs sont mises à l’honneur au grand bonheur de nos followers. Je suis peut-être vieux jeu, mais je préfère souvent les bouibouis crasseux aux menus pompeux. C’est pour cette raison que je suis allé me percher du côté de Toche, un patelin d’une seule ruelle sur la vallée d’en face. C’est beaucoup moins fréquenté car il faut affronter les flancs de collines en Jeep collective et ce, quand le sentier ne s’est pas totalement éboulé. Je bouffe des vues panoramiques et tout autant de poussière, mais le spectacle de l’agriculture quasi verticale qui s’agrippe sur le pan du volcan en vaut résolument le détour. Le lendemain, je passe la journée à marcher vers le sommet car j’ai ouïe dire qu’une source chaude m’y attendait. De retour au village, je bois une soupe de tripoux qui fait le bonheur des toutous, et me poste sur un banc pour observer les cavaliers alcoolisés qui prennent leur temps avant de rentrer. L’épicerie fait office de café de soirée, et les locaux regardent le foot en sirotant un pot de yaourt. La ruelle est un spectacle à ciel ouvert et je trouve tellement beau le quotidien des locaux, même si certains rentrent chez eux éméchés sur leur cheval. J’y retrouve les saveurs et senteurs de mon village mexicain à la différence qu’ici, y’a des grands palmiers et de l’aguardiente (eau de vie qui tue à petit feu).
Le moment était enfin venu d’aller à la rencontre de Chela (la petite copine du grand copain), et de filer un coup de main dans sa plantation. Je découvre une petite nana dynamique, tout en muscle et aux yeux bleu-gris. Elle a trois passions dans la vie - la nourriture qu’elle cuisine avec amour, son terrain qu’elle cultive à la force des bras, et son chéri qui vit bien trop loin mais dont elle ne cesse de parler toute la journée. Je suis triplement touché, car on partage les mêmes ambitions et que son chéri, c’est un ancien client devenu ami et que j’aime voir les gens s’aimer. Marc est en Europe et il arrivera quelques jours après mon départ. Je n’ai qu’une semaine pour contribuer à leur petit projet et je compte bien y saupoudrer la fertilité de mes idées. Chela me reçoit dans son humble maison qui ressemble plus à une cabane en évolution. Le toit de tôle est rafistolé et il faut parfois mettre des casseroles quand il pleut, la porte coulissante se ferme avec un petit cadenas mais un bon coup de pied l’ouvrira, et on lève des bâches en guise de murs, mais seulement quand il pleut. L’installation électrique est précaire, les ampoules s’allument en les vissant et elle insiste pour que je mette des tongs en plastique car le sol s’électrifie parfois, surtout pendant les orages. A vrai dire, elle se fiche un peu de sa maison. Son dada c’est son ‘lote’ (terrain) et elle y passerait toute la journée si elle n’avait pas à s’occuper de son adolescente. Elle m’explique avec beaucoup de fierté que depuis qu’elle a rencontré son ‘amor’, sa vie a été totalement chamboulée. Ce que j’appelle cabane est un palais comparé à l’année passée. Elle vivait sur la terre battue, sous les tôles rouillées et n’avait qu’une seule ampoule pour s’éclairer. Elle descendait dans le bosquet pour se soulager et se douchait au seau derrière l’intimité d’un drap tiré. L’amour donne des ailes et on ne peut pas éviter sa destiné. Chela est un peu le mouton noir de sa famille. Elle ne pense pas comme les autres et depuis gamine, elle dit haut et fort qu’elle épousera un étranger. Sauf que perchée dans sa montagne, les touristes sont inexistants, et qu’il faudrait d’abord la sortir de son terrain pour lui demander sa main. Et pourtant, la vie est pleine de rebondissements, et voici qu’un jour, Marc a déboulé pour visiter un ami installé dans le coin. Son prince charmant a pris son temps mais il est arrivé au meilleur des moments.
Elle me fait beaucoup rire car elle est aussi folle que moi. Y’a des graines qui sèchent de partout, des semis qui poussent dans tout ce qui peut servir de récipients et elle rempli les espaces vides avec des plantes. Son petit terrain fait tout de même 5 hectares et elle cultive tout à la main. Elle manie la machette comme un cow-boy la gâchette et porte des sacs qui font fléchir mes genoux. On passe la majorité de notre temps dans le champs et je n’ai jamais vu autant d’avocats, de papayes et de maracuyas. Y’en a de partout et puisque cette jungle d’abondance est plantée sur un versant pentu, on fait chauffer les mollets pour tout remonter. C’est toujours le bon moment pour ramasser quelques cabosses de cacao et récolter des régîmes de bananes aussi lourds que moi. C’est à coup de machette qu’on taille les feuilles mortes et je murmure des prières pour me protéger des piqûres de scorpions. Ces coquins se nichent dans les feuilles de bananiers qu’on doit justement retirer, ou dans les bottes que je dois enfiler. J’en ressors indemne mais j’aurai tout de même ramené, caché dans mes vêtements, un scorpion clandestin sur le sol américain. Le soir, je joue au magicien avec les enfants du coin et leur transmets mes tours secrets car ils méritent d’être partagés. C’est une vie simple comme je les aime et si je n’avais pas de famille à retrouver, je me serai bien implanté dans cette diversité.
Je termine mon périple en rebondissant dans des petits villages aux noms atypiques et suis exalté de me retrouver dans le 'Santorini colombien' (le jour même où le ‘vrai’ Santorini s’enflammait) ou de dormir au Macondo alors que je replongeais dans l'univers de Gabriel Marquez. Des clins d’oeil de l’univers que je ne prends pas à la légère et qui me confirme à chaque fois être sur la bonne voie. Je termine comme j’ai commencé, mais cette fois-ci, je suis en début de période estivale et je me familiarise avec un Medellín qui regorge de touristes. Mon petit quartier tranquille pullule de gens bien habillés, et les bars s’étalent sur les trottoirs. Y’a des (trop) jeunes filles de charmes aux bras d’hommes trop vieux pour jouer à ces jeux. Les mini-jupes économisent encore plus de tissu et ne cachent même plus les fessiers qui gonflent à vu de nez. Ça sent la cocote, l’herbe et l’alcool distillé, et je croise beaucoup de narines cocaïnées. On est loin de la Colombie que j’étais venu rencontré et ça tombe bien, il est l’heure pour moi de mettre les voiles. Un vol presque direct jusqu’à Miami, des retrouvailles avec ma fille et ma dulcinée, et notre van est déjà chargé et prêt à décoller. En route pour le Kentucky et des projets de jardins qui n’attendent que nos mains…et l'arrivée du Printemps. Merci toi d’être là et de partager ces voyages. love love love Kevin Bonus: Une vidéo prise depuis le terrain de Chela
Visite du Jardin Botanique de Medellín
Voici le site du sanctuaire à Orchidées http://orquideasdeltolima.com/
🥰😍😁🤩 Gracias hermano 🙏🏼🫂