Je reprends donc le fil de ma dernière conversation. Je te demandais si ça t’arrivait, le dernier jour de ton voyage, de rencontrer des personnes que tu aurais adoré rencontrer le premier jour. Moi, ça me le fait souvent, et j’ai appris à profiter pleinement de ces opportunités. Le bon timing est bien souvent hors de ma portée alors mon job est de saisir à pleines mains les présents du divin. Je me dis que tout est parfait et que je rencontrerai toujours les bonnes personnes au bon moment. Donc parfois, je voyage et je ne 'vois' à personne. Je parle aux gens et à tout le monde, mais je te parle de rencontres qui sortent de l’ordinaire. Celles où l'on se 'voit', comme dans Avatar. Tu sais, ces personnes avec qui le feeling passe tout de suite et avec qui tu aimerais passer plus de temps.
C’est encore une fois ce que j’ai vécu lors de mon petit voyage en République Tchèque. J’ai croisé pleins de locaux avec qui j’ai échangé des plaisanteries, mais en ce dernier jour et à cette dernière heure de mon road-trip, j’ai fait une rencontre qui reste particulièrement gravé dans mon coeur. Il s’appelle Mathyas, il est blond, Tchèque et a 16 ans. Il aime écrire des Haïku, monter à cheval et rêve de voyager autour du monde. Il n’est pas particulièrement social et préfère lire au salon de thé qu’une soirée arrosée. Il nous a fallu 5 minutes pour devenir les meilleurs potes du monde le temps d'une heure partagée. je t'explique... Il me restait 3h avant mon vol et alors que je cherchais une Poste pour envoyer mes derniers courriers, je suis passé devant une salle de jeux emplie de gamins déchainés. Au début j’ai souri et me suis demandé dans quelle genre de société on vivait. Je me suis vu les juger, comme si c’était mieux d’être dehors sous la pluie que devant un écran trop bruyant. Et puisque je ne me trouve pas spécialement 'éveillé' quand j'ai ce genre de réflexion, j'ai trouvé une astuce pour m'humaniser. À chaque fois que je m’observe juger quelqu’un ou quelque chose, je fais une pause pour questionner l’essence de ma pensée. Pourquoi tant de résistance? Pourquoi ai-je a commenté ce que les autres font? Et qu'est-ce que ça dit de moi???
J’ai donc trainé devant cette salle et en y jetant un coup d’oeil rapide, j’ai vu qu’il y avait toute une section vintage. Plongeon instantané dans les meilleurs années de ma vie (bon ok, le meilleur moment c’est ici et maintenant, mais j’ai beaucoup de nostalgie pour cette époque). J’ai vu une flopée de flippers avec des modèles très anciens, des jeux d’arcade comme Street Fighter ou Pacman et même le truc de danse que j’ai vu dans le films japonais. Quand j’étais plus jeune, je n’avais pas de sous, et c’était un miracle si j’avais pu chaparder une pièce de 5 francs tombée sous le siège passager ou coincée dans le fauteuil (bon ok, j’avoue, j’ai aussi pris quelques pièces directement dans le porte-monnaie de ma mère). À l'époque, avec 5 francs, tu pouvais faire 2 parties de jeux vidéos, ou 3 parties de flippers, ou 2 baby foot (et il te restait 1 franc pour 5 Malabars). Je me souviens aller dans une salle comme celle-ci et passer plus de temps à regarder les autres jouer qu’à pouvoir m’éclater. Et puis les rares fois où je me suis autorisé une partie de flipper, je perdais la boule en quelques secondes. L’apprentissage coûtait trop cher alors je me contentais de jouer avec les yeux.
Même aujourd’hui, je suis un adulte et j’ai de quoi me payer autant de parties de flippers que je veux, mais je dois avouer que ça reste toujours aussi frustrant. J’ai l’impression que la machine bouffe mes pièces et je peste quand la balle tombe pile poil entre les palmes. Je préfère le Baby foot car je suis un ninja de la pêche et qu’on peut toujours mettre un bonnet dans les buts pour prolonger les parties. Soyons clairs, je ne dis pas que le flipper est une arnaque, c'est bel et bien une question talent! J'ai changé d'avis à ce sujet depuis que j’ai rencontré Nicolas lors d’une de nos retraites silencieuses. Le gars est un pro du flipper! Il voyage en Europe pour faire des compétitions. C’est d’ailleurs pour cette raison qu’il a acheté notre camping-car! Avec une pièce d’un euro, il peut jouer plus d’une heure et la plupart du temps, il n’a même pas le temps d’utiliser tout son crédit tellement ça lui prend du temps pour perdre (ou pour gagner en l'occurence)! Et oui, y’a des gens comme ça! Bref, j’avais une revanche à prendre avec le flipper et mon adolescence de gamin fauché! L’avantage de cette salle, c’est que tu payes à l’heure! Donc tu joues à ce que tu veux et autant que tu veux. Je me suis offert un pass de 2h et j’ai passé ma première heure à faire la tournée des flippers. Et là, au bout du 5ème flipper, je suis pris d’une vague d’émotion. Je me retrouve nez à nez avec le flipper de mon enfance, Attack From Mars. Montée de nostalgie et c’est les mains tremblantes d’excitation que je tire sur la gâchette. C’est une avalanche de sons, de phrases, et de musiques qui me renvoient 30 ans en arrière! Je suis ému de retrouver ce vieux pote et encore plus de faire péter mon score perso!
Bon, à la base, je suis venu t’écrire de la rencontre avec Mathyas. Mais l’introduction est importante car c’est grâce à ce OUI que j’ai pu croiser sa route. Après avoir rempli mon enfant intérieur de bonheur, je suis allé voir dans les jeux un peu plus modernes, et je me suis arrêté devant un grand écran géant et deux flingues un peu dingues qui n’attendaient que moi pour dégommer des zombies enragés. Le jeu peut se jouer en solo ou à deux. Il suffit de choisir en début de partie. Je suis venu tout seul, et mon petit doigt me dit de quand même mettre 2 players, juste au cas ou… un peu comme la part du pauvre qu’on met à table ou le verre supplémentaire qu’on rajoute quand on boit le thé marocain. Juste au cas ou. Je commence la partie et au bout de quelques instants, un jeune homme se met à me regarder jouer. Je lui souri, et lui dit de me rejoindre! On commence à mitrailler tout ce qui passe et comme deux soldats dans une mission de haute importance, on s’épaule pour cette aventure. On rit ensemble, on s’encourage, on se félicite, le tout en faisant connaissance, en se racontant (en anglais) ce qu’on fait ici et pourquoi on est là. J’ai un avion à prendre et il est le chaperon attitré pour la sortie de son petit frère. Ni l’un ni l’autre ne voulions être ici à la base, et pourtant… On passe 1h à tester pleins de jeux différents. Je lui mets la pâté avec des Hadoken et des Fatalités, et on se ridiculise sur les pas de Dance japonais.
On se raconte nos vies, on échange au sujet de la poésie et on partage la passion commune des chevaux et des voyages. On kifferait trainer ensemble dans les cafés et prolonger ces longues conversations, mais le temps nous fait presque défaut. Il me parle de Mongolie, et je lui dit qu’un jour, il faudrait qu’il aille voir un Bouzkachi, ce genre de foot équestre où le ballon est remplacé par une carcasse de chèvre. Je me souviens qu’à son âge, j’avais été tellement inspiré par des voyageurs et je savais qu’un jour, ça allait être mon tour d’inspirer les jeunes rêveurs. Mais pour cela, il me fallait voyager et accumuler des folles histoires à raconter. Des histoires, j’en ai à présent à la pelle et du haut de mes 42 ans, ce n’est pas prêt de s’arrêter. Je suis un voyageur né, un aventurier sans trop de danger, et je compte bien continuer tant que je pourrais marcher, rouler, ramper ou à défaut, quelqu’un pour me pousser.
On s’est quitté avec une belle étreinte fraternelle et à présent, c’est avec la plume qu’on va échanger. Mon premier courrier est en chemin et d’ici peu, je prendrai plaisir à lire sa réponse. Voyageons ensemble, avec les mots, avec les jeux, et avec les yeux. Merci de me lire et j’espère un jour croiser ta route pour une tranche de vie à célébrer. D’ailleurs, vers la mi janvier, je file barouder en Colombie et je propose à 4 personnes de me rejoindre pour une aventure à taille humaine, et pour contribuer positivement à l’humanité. D’ici là, restons connectées… Kevin Ps: Tu aimes écrire des lettres? Ça fait plus de 10 ans que j’anime Postcard Roulette. Je mets en lien des inconnus pour s’envoyer du courrier et échanger une page d’authenticité. Tu veux nous rejoindre? Écris-moi, c’est gratuit et offert par korAkor. info@korakor.org
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