Après ma cure d’un mois (d’ayurdeva, de silence, et d’ennui), j’avais envie de voir du monde pour frotter mes idées et mes projets. Je suis donc retourné à Varkala, 20 ans plus tard! À l’époque, c’était une petite plage de pécheurs, avec quelques cahutes où l’on servait du thé toute la journée et quelques samosas. C’est dans ce petit village côtier du Kerala que j’ai vendu mon vélo indien pour une coupelle de roupies et une poignée de main.
Après un mois de solitude, j’avais soif d’échange, et j’ai donc réservé une chambrette dans un centre de yoga où ils forment la nouvelle génération de professeurs. Pour être clair, je ne cherche pas à devenir prof de yoga, mais je suis toujours à l’affut de gens inspirés et surtout, j’aime bien m’entourer de passionnées! Pendant le long voyage en train, bondé à souhait et sous-ventilé, j’échange des plaisanteries avec des locaux toujours aussi surpris de voir un étranger sur ces itinéraires peu fréquentés. On baragouine comme on peut, et à défaut d’aller dans les profondeurs du coeur, on me fait défiler les milliers de photos qui inondent les smartphones. J’ai l’impression d’avoir un résumé ultra condensé de leurs 5 dernières années. (NB: 80% des photos qu’on a dans notre téléphone ne servent absolument à rien!)
J’ai à peine fini de scroller l’historique d’un téléphone que mon autre voisin de banquette m’invite à explorer le sien. J’ai les yeux qui piquent, mon trouble de l’attention est mis en exergue et heureusement, je trouve ma sortie de secours quand le vendeur de thé déboule avec son chant ‘Chaiiiiiiiiiii, Coffee Coffee, chaiiiiiiiiii’ Je paye ma tournée et tout le monde se retrouve avec un gobelet jetable en terre crue empli de thé brulant. Nos sourires sont ponctués de petites ondulations de tête et le silence reprend enfin.
Permets-moi une petite aparté sur ces tasses de thé. On les nomme khulad. Ce sont des petits récipients, fait mains et à usage unique, qu’on jette ensuite par la fenêtre du train. Poussière tu retourneras poussière. En quelques secondes d’évasion poétique, l’idée me vient d’intégrer des graines (et une pincée de compost) à cette mixture d’argile et de fleurir les chemins ferroviaires. Je garde ce projet en tête pour une prochaine vie ou un prochain voyage.
J’arrive de nuit et je réalise que le centre yogique est désert. On m’annonce que le dernier Teacher’s Training Course de la saison s’est terminé hier. La mousson arrive bientôt et l’hôtel va fermer. Je suis le dernier client de la saison et ma soif de partage sera comblée en compagnie d’un chat qui fera tout pour m’empêcher de faire mon yoga.
Le lendemain, je décide d’être le premier sur la plage et à ma grande surprise, elle est déjà remplie à 6h du matin. Les indiens se lèvent tôt pour leurs rituels quotidiens, et savent profiter de la fraicheur matinale. Les premières Pooja (prières) commencent à 4h30 et on entend les clochettes et les mantras retentir dans chaque maison. Les vacanciers indiens m’ont toujours fait rire. Ils se baignent tout habillés et s’assoient en famille dans les vaguelettes qui leur font faire des roulé boulés.
À 7h pétante, un nouveau personnage fait son arrivée fracassante sur la plage - The Lifeguard. Son job consiste à faire d’inlassables aller-retours le long de la plage et de siffler à tue-tête pour faire reculer les barboteurs. Il est officiellement interdit de se baigner, et une ligne de sécurité est établie à 30m de l’eau. Les vagues ne sont pourtant pas puissantes, mais les courants sont traitres et j’imagine que ces décisions gouvernementales ont été prises suite à des incidents à répétition. Bon, après, on est en Inde, et la loi est aussi malléable que le psoas d’un yogi. Le gardien de la paix peine à faire respecter les distances de sécurité. À peine a t’il tourné le dos qu’une vague humaine retourne à l’océan pour prendre des selfies et tremper le bout de leurs saris. C’est un spectacle comique qui remplace le scrollage intempestif.
La plage de Varkala s’étend aux pieds d’une falaise sur laquelle s’enchevêtrent des centaines de boutiques, restaurants, et petits hôtels en tout genre. Je prends plaisir à flâner et côtoyer les saisonniers qui prennent le temps de discuter en cette période ‘hors-saison’. Il fait beaucoup trop chaud pour le tourisme européen qui préfèrent la fraicheur du nord, mais rien n’arrête les touristes indiens qui profitent de leurs vacances scolaires en famille, en clic ou en amoureux. Je rencontre un tas de personnes avec qui j’échange des courtoisies et encore plus de mondaineries. Je réponds mille fois aux mêmes questions et passe mes journées à poser pour des selfies.
Suite à ma cure ayurvédique, je suis censé rester au repos et éviter les stimulations inutiles pour que la médecine infuse. Mais bon, après avoir tourné en rond dans ma chambre pendant un an, j’ai besoin de me dégourdir les neurones et je brise ma sobriété au café entamée 7 mois plus tôt. Je fais un petit rituel pour briser ce jeûne. J’ai minutieusement cherché le lieu idéal pour m’adonner pleinement à ce plaisir cérébral. Nos retrouvailles se célèbrent. C’est donc au deuxième matin, avec une vue splendide sur l’horizon et une musique douce dans les oreilles que je me suis offert ce petit cadeau. Je commande mon café, je prends le temps de pleinement le humer, je savoure des yeux sa petite crème de surface, j’ouvre mon carnet sur une nouvelle page vierge, et je prends une première gorgée. J’en ai des frissons de plaisir!
Rapidement, mon cerveau se met en route et je commence à griffonner des idées et rêves à réaliser. Ça fuse dans tous les sens, comme s’il pleuvait averse dans le désert californien. Je fais claquer des rimes à profusion, je griffonne des projets un peu fous, et je décide de relancer une semaine de Kalam Kalam pour retrouver ma communauté de potes éveillées. D’ailleurs, je profite de cette opportunité pour t’inviter à nous rejoindre un jour pour goûter à ce rituel matinal qui remet toutes tes pendules à l’heure et te file une patate créative. On se retrouve (en ligne) pendant une semaine, chaque matin avant 6h pour méditer, connecter et échanger en conscience. À chaque fois, ça rebooste mon humanité et me pousse à être encore plus centré sur ma mission terrestre = Répandre mon amour!
Chaque matin, je me lève et avant d’avoir posé un pied par terre, je demande à Dieu de me donner l’opportunité d’Aider, de Servir et de Contribuer positivement. Être au service du vivant me rempli d’une joie incomparablement extatique. C'est la meilleure drogue du monde. Je suis tellement honoré de pouvoir tendre la main à des inconnus. Bien entendu, je n’en fais pas une obsession et je ne cherche pas (plus) à sauver quiconque. Je veux juste, à mon tour, être un de ces anges que j’ai moi-même croisé sur la route. Je suis pour la solidarité, l’entraide, et la diffusion de son talent - et le mien, c’est probablement d’aider les autres à dire OUI à leurs rêves.
Au total, je suis resté 2 semaines à Varkala et mes prières ont été exhaussées. J’ai fait de merveilleuses rencontres et j’ai pu ajouter une pincée de magie dans le quotidien d’un tas d’humains. J’ai motivé des jeunes à faire des pompes à 5h30 sur la plage, j’ai écoulé le stock de créations d’un artiste aux poches vides (merci à mon réseau d’avoir acheté ses cartes!), j’ai retiré un paquet de tiques sur mes amis canins, et j’ai même pu ajouter une touche de magie à un jeune couple en lune de miel. Bref, j’ai passé mes journées à semer des graines de bonheur dans les coeurs en fleur. Bon, j’ai aussi pris du temps pour moi, ma santé et mon kiffe. Je me suis offert une séance d’acuponcture, un bain de bols tibétains, une initiation au Mantra (j’ai pas dit Tantra!!!), une session de ‘cupping’ et j’ai sympathisé avec un lutteur-masseur Kalari qui a plongé ses coudes de golgoth dans mes noeuds dorsaux.
J’aurai pu rester longtemps à Varkala, mais j’ai les pieds voyageurs et le coeur mouvementé. Il me restait encore 15 jours avant de devoir quitter l’Inde, et puisque je n’avais aucun plan, j’ai décidé de faire ce qui a toujours fonctionné le mieux pour moi = j'ai marché vers le sud… Je savais que quelque chose d’inouïe m’attendait dans ce voyage. Quelque chose qui me ferait passer au niveau supérieur de ma quête existentielle. Et je ne m’étais pas trompé… Psssst, je vous raconte comment j’ai ouvert un Ashram dans le prochain épisode. Reste connectée! Namaste, Kevin Ps: Nous avons une membre de korAkor, Clara, qui a épousé un indien et tient une guesthouse à Varkala (elle était de passage en France quand je suis venu). Si un jour tu y vas, je te mets en lien avec elle.
Love love love!